La contribution des acteurs de la société civile à la promotion de la qualité des dépenses publiques au Tchad n’est point à démontrer depuis l’avènement du pétrole jusqu’à nos jours. De nombreuses organisations de la société civile mènent des activités en faveur de la qualité des dépenses publiques.
Les organisations de la société civile et les syndicats au Tchad ont été au-devant de la lutte contre la corruption. Les associations de droits de l’homme avec à leur tête le collectif des ADH, droits de l’homme sans frontières et autres n‘ont jamais hésité à dénoncer sous toutes leurs formes et dans tous les angles les actes de corruption au Tchad. Les organisations syndicales quant à elles et l’union des syndicats du Tchad en particulier, se sont distinguées, à travers les manifestations des fêtes de travail, dans les dénonciations des actes de corruption.
D’autres personnalités civiles, des universitaires-chercheurs, des personnes ressources et des intellectuels ainsi que les médias non partisans ont, à leurs manières, contribué à exiger des pouvoirs publiques la transparence dans la gestion des ressources nationales et la bonne gouvernance. Les parlementaires tchadiens, à travers leur cellule de réseau africain des parlementaires pour la lutte contre la corruption n’ont pas été du reste.
Cependant, un travail remarquablement scientifique a été fait par un bureau d’études appelé Groupe de Recherches Alternatives et de Monitoring du Projet Pétrole Tchad-Cameroun (GRAMP/TC), allié et partenaire des organisations de la société civile. Il s’agissait de former les représentants des populations sur les techniques de suivi budgétaire et il en était suivi la mise en place des structures appropriées dans les circonscriptions administratives élues.
Les organisations de la société civile tchadienne avaient massivement adhéré à cette démarche et plus particulièrement celles du Réseau de la Société Civile, à savoir la Commission Permanente Pétrole de Ndjaména CPPN (regroupant 24 organisations dont 2 centrales syndicales, 6 ADH, 5 réseaux locaux, 9 ONGs, 2 associations), la Commission Permanente Pétrole Locale CPPL, le Réseau de Suivi des Activités Pétrolières dans le Moyen Chari RESAP/MC et le Réseau des Organisations de la Société Civile du Logone Oriental ROSC–LO.
Les actions menées par les OSC tchadiennes en matière de suivi budgétaire et suivi des investissements publics. Démarches judicieuses et légalistes de la société civile tchadienne
Lors de la rencontre de BEBIDJA en Avril 1998 sur les conditions des parties prenantes au méga projet de la construction du pipe – line TCHAD – CAMEROUN (Etat Tchadien –Banque Mondiale Esso et Société civile), la société civile tchadienne avait posé comme conditions, entre autres, la création d’un organe autonome chargé de la gestion des revenus pétroliers. Ladite proposition avait requis l’assentiment de l’ensemble des parties et au premier chef, le Président de la République, Chef de l’Etat qui l’entérinera par promulgation de la Loi n°001/PR/ 99 du 11 janvier 1999, portant Gestion des Revenus Pétroliers ; modifiée et qui a donné la Loi n°016/PR/2000, portant modification de la Loi n°001/PR/99 du 11 janvier 1999 portant Gestion des Revenus Pétroliers.
Le souci de la bonne gestion et du contrôle des dépenses avait guidé l’ensemble des acteurs parties prenantes. Ces lois qui ont permis la création du Collège de Contrôle et de Surveillance des Revenus Pétroliers (CCSRP) avaient fait la fierté de toute la population tchadienne mais plus particulièrement celle des responsables des organisations de la société civile qui ont vanté et disséminé ces textes de lois dans sous-région de l’Afrique centrale et à travers le monde.
Contre toute attente, la loi n°002/PR/2006, portant amendement de la Loi n°001/PR/99 du 11 janvier 1999 portant Gestion des Revenus Pétroliers et la Loi n° 016/PR/2000 du 18 août 2000 est promulguée, supprimant ainsi les revenus pour les générations futures et élargissant la liste des Ministères prioritaires.
En septembre 2006, le GRAMP/TC a organisé, dans le cadre de ses activités de l’Observatoire de la Gestion des Ressources Publiques (OGRP), un Forum national sur le budget de l’Etat ayant regroupé une centaine de participants dont les directeurs généraux et chefs de services, quelques ministères prioritaires, des délégations régionales du ministère de finances et des secteurs prioritaires, des hauts cadres des institutions de contrôle, les élus du peuple, etc.
Placé sous le haut patronage du Premier Ministre, Chef du Gouvernement, le forum a offert l’opportunité de discuter sur les différents thèmes notamment, l’élaboration des avant projets de budget par les ministères de l’éducation nationale et de l’action sociale, le rôle du ministère de finances dans les phases d’élaboration et d’adoption du budget : cadrage macroéconomique, mécanismes d’allocation des ressources et conférences budgétaires, le Rôle du Collège de Contrôle et de Surveillance des Ressources Pétrolières (CCSRP) dans le processus budgétaire au Tchad, le Rôle de l’Assemblée Nationale dans les phases d’élaboration et d’approbation, d’exécution et de contrôle du Budget, le rôle du ministère de finances dans les phases d’exécution et de contrôle du budget, le Système de Suivi des Dépenses jusqu’à Destination (SSDD), le processus de suivi et de contrôle budgétaire par la Chambre des Comptes de la Cour Suprême (les comptes administratifs et les comptes de gestion), le processus de suivi et de contrôle budgétaire par le Ministère d’Etat chargé de la Moralisation, le Rôle des citoyens dans les phases d’élaboration et d’approbation du Budget, quel partenariat entre les différents acteurs dans les différentes phases du budget au Tchad ?
Six (6) ans après, le GAMP/TC réitère l’exercice autour de la thématique suivante : « Gouvernance des ressources publiques, le Budget de l’Etat et des Collectivités Territoriales Décentralisées »
Les raisons et le processus des suivis budgétaires dans le contexte de la Gouvernance des ressources publiques, le Budget de l’Etat et des Collectivités Territoriales Décentralisées.
L’organisation d’un forum adapté au nouveau contexte : l’objectif de ce forum est de renouveler le débat sur les grands défis de la gestion des ressources nationales, la transparence budgétaire et la bonne gouvernance ainsi que l’obligation de rendre compte des gestionnaires publics. Il s’agit de mettre en évidence les principaux problèmes qu’ils suscitent en vue de proposer des pistes de solutions pour améliorer la transparence et la gouvernance économique et sociale dans l’optique de la lutte contre la pauvreté.
Il s’agit d’offrir une occasion à une centaine de personnes à savoir, les principaux partenaires et responsables nationaux dont les Ministres, Députés, Directeurs généraux des ministères, Secrétaires Généraux des ministères et des communes, Directeurs Généraux des grandes institutions ayant des budgets autonomes, etc., intéressés par les questions de transparence et de gouvernance responsable au Tchad de discuter et formuler des alternatives aux maux qui gangrènent la bonne gouvernance économique et sociale du pays.
De manière spécifique, il a s’agit de :
- Prolonger le débat sur la démocratisation du processus de budgétisation, l’exécution et le contrôle du budget public impliquant les différents organes de contrôle de l’Etat ;
- Examiner les grands enjeux, les défis et contraintes de la transparence et la bonne gouvernance des ressources publiques au Tchad ;
- Questionner les objectifs de la budgétisation actuelle en lien avec les politiques et programmes ainsi que l’arbitrage entre objectifs politiques et priorités des populations ;
- Faire un état des lieux des pratiques actuelles de budgétisation et leurs implications pour la bonne gouvernance budgétaire au Tchad ;
- Analyser les contraintes et défis liés à l’application du principe de l’obligation de rendre compte et la redevabilité en matière de gestion des ressources nationales
- Analyser les grands défis et les contraintes de la gouvernance budgétaire auxquels font face les différents mécanismes et institutions de contrôle existants ;
- Examiner dans quelle mesure la culture citoyenne et la notion des biens publics peuvent être instaurées au Tchad à travers la meilleure connaissance par les citoyens du Budget public et comment ceux-ci peuvent contribuer à la transparence et la bonne gouvernance dans le processus budgétaire ;
- Susciter l’intérêt du grand public pour la gestion budgétaire et la participation active de la population au contrôle de l’action publique en vue de conduire à une bonne exécution du budget national au 3ème Forum sur la gouvernance des ressources, le budget de l’Etat et des collectivités territoriales décentralisées.
A la fin des travaux dudit Forum, de nombreux cas d’observations ont été relevés à travers des considérations, ce qui a permis aux participants d’adresser des recommandations au Gouvernement, au CCRSP, à l’Assemblée Nationale, aux OSC et enfin aux Partenaires Techniques et Financiers afin d’améliorer la qualité des dépenses publiques au Tchad.
Les différentes actions des organisations de la société civile tchadienne en faveur de la qualité des dépenses publiques et la transparence dans la gestion des biens publics méritent d’être saluées à juste titre. Car ce dynamisme a contribué significativement aujourd’hui à la prise en compte de la société civile dans les interventions de l’Etat. Le budget citoyen intervenu depuis 2016 en est une parfaite illustration.
PEUGONBA Garka Boukinebe, Secrétaire exécutif de l’Association Agir pour le Progrès Collectif (APC), Directeur Général du Centre d’études, de Recherches et de Formation en environnement de la Promotion de la Prévention des Risques Professionnels.
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