Les fonds pour les générations futures font partie des fonds souverains qui sont définis comme une structure d’investissement détenu par un Etat ayant pour but, soit de faciliter le transfert des richesses entre les générations, soit de diversifier les réserves nationales, soit d’éviter un potentiel ralentissement de l’économie.
On peut les classer en quatre grandes catégories :
- Les fonds d’épargne pour les générations futures dont le but est le transfert de richesse entre générations. Ces fonds sont mis en place généralement par les pays dotés de matières premières et le caractère épuisable de ces matières premières est la raison pour laquelle l’Etat accumule des réserves pour les prochaines générations. L’équité intergénérationnelle justifie la mise en place de ces fonds. Les fonds possèdent alors une logique d’investissement de long terme. C’est le cas du Kuwait Investment Auhority, du Government Pension Fund de Norvège et le plus connu autrefois au Tchad, le Fonds pour les Générations futures ;
- La famille des fonds dits de stabilisation macroéconomique dont le but pour les pays fortement dépendants des matières premières (pétrole, gaz,…) est de faire face à une situation conjoncturelle difficile telle qu’une baisse des prix de ces produits. Ils s’inscrivent dans une logique de court terme. C’est le cas du Reserve Fund de Russie ou de Economic Social Stabilization Fund du Chilie ;
- La famille des fonds visant à couvrir des besoins non connus à l’avance tels que le financement des retraites (par ex. les fonds de pension) ;
- Enfin, les fonds souverains regroupent les fonds d’investissement de réserves. Ces derniers cherchent à augmenter la performance financière des réserves grâce à des profils risque-rendement plus élevés que ceux issus d’investissements traditionnels. C’est le cas de la Korea Investment Corporation, China Investment Company, etc.
A l’origine, la création d’un fonds souverain permet à un pays exportateur de pétrole d’échapper à la malédiction des ressources naturelles, phénomène bien connu dans les pays exportateurs de pétrole associé au syndrome hollandais et à un fort déficit de gouvernance.
La progression rapide de la puissance des fonds souverains a pu laisser craindre en occident que leurs investissements en actions (40% des actifs) auraient des volontés de contrôle dans des buts autres qu’économiques.
Des réponses préventives ont été cependant mises en places dans ces pays afin d’éviter la prise de contrôle d’entreprises stratégiques. Force est de constater qu’elles aient été inutiles. En effet, pendant la crise, les fonds souverains ont été les seuls, avec les Etats, à procéder à des achats massifs des institutions financières en difficulté, contribuant ainsi à éviter leur faille systématique. Des règles internationales de gouvernance encadrent désormais leur fonctionnement (principes de Santiago). Dès lors, les fonds souverains peuvent constituer des véhicules importants pour répondre aux dérèglements du capitalisme global.
Cependant, pour la catégorie des fonds souverains qui nous intéresse particulièrement dans cet écrit, à savoir les fonds pour les générations futures, quelle utilité de constituer une épargne pour les générations futures ? Comme l’avait dit Keynes, demain, nous serions tous morts, ou ne dit-on pas que le meilleur investissement pour les générations futures est de leur préparer le chemin en améliorant les institutions capables de leur offrir un avenir meilleur ?
Le débat sur les générations futures connaît une amplitude sans précédent dans des forums internationaux, nationaux et locaux, notamment à propos des effets lointains de décisions relatives aux transformations de patrimoines communs et aux risques futurs collectivement assumés. Les conceptions de l’intérêt général semblent ébranlées par des débordements dans l’espace et dans le temps relativisant les préoccupations exclusivement « nationales» et «présentes». Comme nous l’avons dit plus haut, les fonds souverains et particulièrement les fonds pour les générations futures sont créés dans des pays fortement dotés de ressources naturelles et ayant un fort déficit de gouvernance. Le déficit de gouvernance soulève la crainte d’une bonne utilisation de ces ressources qui, logiquement, appartiennent à tous habitants d’un pays, ceux vivants actuellement ou la génération future. Etant donné cette crainte, certains pays ont décidé d’alimenter régulièrement un pourcentage fixe des revenus pétroliers, qui sont réinvestis sur le marché international des capitaux dans des actifs financiers pour les générations futures. Cette démarche s’inscrit dans une logique d’équité. Cependant, pour le cas par exemple des pays africains fortement pauvres et dans lesquels, les habitants actuels ne peuvent satisfaire leurs besoins essentiels, quelle serait l’utilité d’une telle démarche ? Toutefois, la logique d’équité dans un contexte de gouvernance déficitaire, conditionne une telle démarche.
Bien que les pays africains soient parmi les pays qui connaissent une forte croissance de leur population, ils sont dans une dynamique de transition démographique et connaissent une baisse relative de la fécondité et de la mortalité qui influencent la structure par âge de la population à travers une baisse du ratio de dépendance démographique. Cette croissance de la population peut avoir un effet sur la croissance économique mais cet effet n’est pas automatique puisqu’il dépend de la qualité des institutions et de la capacité de l’économie à accumuler du capital physique et humain mais aussi d’absorber la population potentiellement active dans l’emploi productif. Ainsi, le meilleur investissement pour les générations futures serait d’améliorer la qualité des institutions et la capacité de l’économie à accumuler un capital humain productif de meilleure qualité, seul gage d’un futur radieux. Mais en l’absence de garanti pour une amélioration de la qualité des institutions, la constitution d’un fonds pour les générations futures serait la solution la moins mauvaise et la plus équitable.
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