ADC et téléphonie mobile au Tchad

Source : afrique7.com

Depuis 1990, le paysage politique africain a connu un bouleversement. De plus en plus, les différentes catégories socioprofessionnelles se voient impliquer à divers niveaux dans le processus de gestion de la cité. Ceci à travers les organisations de la société civile qui apportent leurs contributions significatives en termes de participation à l’élaboration des politiques, d’évaluation ou de critiques constructives.

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L’important c’est que la société civile qui s’investit en toute indépendance est devenue un acteur, un partenaire avec lequel il faut compter.

C’est dans ce contexte qu’a été créée le 08 mai 1994, l’Association pour la Défense des Droits des Consommateurs (ADC). Elle a obtenu sa reconnaissance légale du Ministère de l’intérieur le 08 juin 1995.

Les objectifs de l’ADC

  • information, formation et éducation des consommateurs,
  • protection des intérêts économiques des consommateurs,
  • prévention sanitaire,
  • sauvegarde de l’environnement,
  • garantie de la qualité,
  • amélioration du cadre de vie.

L’ADC est affiliée à plusieurs réseaux et plates-formes. Depuis 2001, elle est membre plein de l’Organisation Internationale des Consommateurs (Consumer’s International CI/OIC).

Les actions de l’ADC couvrent tous les domaines de la consommation des biens et services, entre autres l’eau et l’assainissement, la prévention sanitaire, les TIC, les transports, la salubrité des aliments, la qualité des produits, la protection de l’environnement. Bref, tous les secteurs qui mettent en jeu les intérêts du consommateur.

Les TIC constituent particulièrement l’un des domaines d’intervention dans lesquels l’ADC est très active. En effet, la première action fut la contribution combien importante au séminaire sur la réforme du secteur des postes et télécommunications au cours duquel les préoccupations des consommateurs ont été exprimées. La réforme s’inscrivait dans la ligne droite de la politique d’ajustement structurel du Gouvernement visant les objectifs majeurs à atteindre : la séparation des activités postales de celles des télécommunications, la séparation des fonctions de réglementation, régulation et d’exploitation des télécommunications, le lancement d’appel d’offre pour l’attribution des licences de téléphonie mobile aux opérateurs, etc.

A l’époque, l’accès à ces services constituaient un luxe. Seuls quelques privilégiés nantis disposaient de lignes téléphoniques, en plus des services de l’administration publique et du secteur privé. Malgré les efforts consentis dans l’extension et l’installation des nouvelles infrastructures, avec 8500 abonnés en 1998, le Tchad comptait 12 lignes pour 10 000 habitants, alors que la moyenne de l’Afrique Subsaharienne était de 46 lignes pour 10 000 habitants. Les communications coûtaient extrêmement cher. A titre d’exemple, une minute d’appel interurbain coûte 600 FCFA, et 1400 FCFA pour l’international. Alors qu’en Côte d’Ivoire, elles coûtaient respectivement 211 FCFA et 486 FCFA.

La situation des télécommunications

Actuellement, le paysage des télécommunications est marqué par la présence de cinq (05) opérateurs. Soit un opérateur de téléphonie fixe et quatre (04) opérateurs de téléphonie mobile. Cependant, le secteur est dominé par les deux géants que sont Airtel et Tigo qui totalisent à eux seuls plus de 98% des parts de marché. Une autorité de régulation, nommée « Autorité de Régulation des Communications Electroniques et des Postes », créée par la loi N°13/PR/2014, est également mise en place pour s’assurer du respect des cahiers de charges des opérateurs. 

Le téléphone fixe

Le réseau fixe exploité pour les télécommunications nationales par l’ONPT et pour l’international par la TIT est désormais géré par un opérateur public unique, la SOTEL TCHAD dont le capital est détenu à 100% par l’Etat. La privatisation programmée depuis l’année 2001 n’a pas pu se réaliser pour diverses raisons, notamment le désistement de la banque mondiale du processus de réforme du secteur des télécommunications, la carence constatée en 2004 suite à l’appel d’offres international de cette privatisation.

La téléphonie mobile

La téléphonie mobile a permis d’étendre considérablement l’accessibilité à la communication. Elle est parvenue à toucher les populations dans les coins les plus reculés du pays. Sur les près de 5 millions d’abonnés de la téléphonie mobile, l’on compte en 2015 plus d’un million d’utilisateurs de l’internet. Les tarifs de la connexion Internet ont relativement baissé mais restent tout de même plus élevés que ceux de bon nombre de pays d’Afrique Subsaharienne. 

Les actions de l’ADC

L’ADC a été non seulement partie prenante au processus de réforme du secteur des télécommunications, mais a contribué également à l’élaboration de plusieurs textes relatifs aux TIC. De même, elle a réalisé en 2003 une étude sur l’accès aux services des postes et télécommunications au Tchad. Cette étude a permis de faire un état des lieux du secteur, de faire une comparaison avec la situation de certains pays ayant une économie similaire à la nôtre.

Dans son rôle d’association de la société civile, l’ADC informe les consommateurs sur leurs droits, leur devoir, attire leur attention sur la qualité des produits et services, et leur recommande d’adopter un comportement rationnel et responsable.

A l’endroit des opérateurs, l’ADC dénonce les mauvaises pratiques, les désagréments que subissent les consommateurs et la mauvaise qualité du réseau. Elle se prononce également sur les tarifs pratiqués et le mode de facturation. A cet effet, plusieurs correspondances ont été envoyées et des rencontres tenues avec les responsables afin d’obtenir la réparation des torts causés aux usagers.

A titre d’exemple, l’ADC a réclamé et obtenu la baisse des coûts de communication, la facturation à la seconde, la couverture maximale du territoire nationale. Même si certaines revendications ne sont pas encore satisfaites.

Ce qui a conduit les usagers tchadiens à observer le 15 mars 2013, une journée sans téléphone, exprimant ainsi leur ras-le-bol par rapport à la qualité des services et à la multiplication des taxes sur ce service. Une première au Tchad en termes de boycott des services de la téléphonie mobile. Cette action a déclenché le dialogue ayant conduit à l’amélioration de la qualité des services dont l’accès à la 3G et à la 4G. De nos jours la qualité de la connexion Internet s’est améliorée, bien qu’elle ne le soit pas de manière permanente.

L’ADC fait des plaidoyers auprès des autorités en charge du secteur pour les amener à adopter les bonnes politiques en la matière, répondant le mieux aux désirs des consommateurs. Pour ce faire, l’instauration de la redevance audiovisuelle, la taxe pour le développement du sport et le prélèvement de 50Fcfa sur les appels entrants au Tchad ont tous fait l’objet d’opposition par différents moyens de l’ADC. Malheureusement les appels n’ont pas été entendus par les Députés qui ont voté ces Lois. Ce qui dénote la non prise en compte des aspirations des populations par leurs propres élus.

L’ADC interpelle régulièrement l’autorité de régulation pour faire respecter les cahiers de charges auxquels sont soumis les opérateurs de téléphonie mobile.

Perspectives

En priorité, l’ADC compte créer des cellules dans toutes les régions afin de pouvoir toucher les populations de l’intérieur du pays. Ainsi, il sera plus facile de faire passer les messages de sensibilisation ou des mots d’ordre de mobilisation des consommateurs pour une cause citoyenne.

La Gouvernance au niveau des différentes institutions étant décriée, l’ADC va mettre l’accent sur le contrôle citoyen. C’est le moyen dont dispose les OSC pour évaluer les actions des institutions relevant du domaine public, et se prononcer en conséquence afin de susciter des changements dans le sens positif.

Le modèle d’engagement adopté restera identique. Le plaidoyer sera le domaine privilégié pour amener les autorités à adopter les textes d’application des principales lois relatives aux questions de consommation. Dans cette optique, l’ADC continuera à apporter ses contributions à la formulation des bonnes politiques dans l’intérêt des citoyens consommateurs.

13330263_10206706298838336_915873884_n A propos de l’auteur : Yaya SIDJIM est économiste et membre du bureau de l’Association de Défense des Consommateurs  (ADC).

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