Par Sikod, F., Djal‐Gadom G. et A. L. Fotuè Totouom. African Development Review, Vol. 25, No. 3, 2013, 344–357
Le concept de soutenabilité renvoie à la «non-décroissance» du bien‐être économique dans le temps (Vivien, 2004). Aujourd’hui, les pays exploitant des ressources épuisables sont de plus en plus sensibles à cette problématique. Pour un nouveau producteur du pétrole comme le Tchad, la question de la soutenabilité appelle à s’interroger sur la manière dont la richesse issue de l’exploitation de cette ressource épuisable devrait être gérée afin d’assurer une croissance économique durable. L’exploration pétrolière et la découverte des premiers gisements depuis 2000 ont produit des effets stimulateurs considérables sur la croissance du produit intérieur brut (PIB). Le pétrole fournit des ressources financières importantes au gouvernement tchadien. Il représente 80% des exportations depuis 2004 (INSEED). L’activité pétrolière couvre en moyenne 40% du PIB et fournit au moins 75% des recettes budgétaires ordinaires (BEAC, 2012). Le pétrole est cependant une ressource tarissable. Les prévisions faites par le Fond Monétaire International (FMI) ont montré que les réserves de Doba dont le stock initial était estimé à 900 Millions de barils n’ont qu’une durée prévisionnelle de 28 ans. Ainsi, au moment où la production pétrolière tchadienne amorce sa vitesse de croisière, il y a lieu de s’interroger sur sa réelle capacité à promouvoir une croissance économique soutenue et continue au Tchad; ce d’autant plus que les pays comme le Nigéria, l’Angola ou le Gabon qui ont de tout temps été à la tête du peloton des pays africains producteurs de pétrole, ne se sont pas toujours illustrés par des résultats satisfaisants en la matière.
L’objectif de cette étude est d’analyser la soutenabilité économique de l’exploitation des ressources pétrolières au Tchad. Le présent travail qui a le mérite d’être la première du genre au Tchad, fournit des éléments d’analyse permettant de mieux apprécier l’exploitation actuelle du pétrole tchadien dans la perspective d’une gestion durable de cette ressource. Le calcul des indicateurs de soutenabilité fait sur la base de données couvrant la période 2000–2012 a permis de constater que les ressources pétrolières ont un impact positif sur le potentiel économique actuel du Tchad. Cependant, l’après pétrole mérite une attention particulière. L’épargne nette ajustée est égale à –27% du PNB et le revenu national soutenable est faible et ne représente que 43% du PIB. Ces résultats montrent que les ressources pétrolières ne peuvent pas soutenir de manière durable l’économie tchadienne. Le patrimoine pétrolier tchadien est relativement restreint. Pour assurer la soutenabilité de ce patrimoine, il conviendrait d’épargner 35,9% du revenu pétrolier par an et l’investir dans un fonds spécifique pour soutenir les flux de richesse à long terme.
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